Nous sommes là pour proposer des solutions innovantes

Lancée voilà maintenant sept ans, en 2014, DECALIA approche les 5 milliards d’actifs, et figure désormais parmi les plus importantes sociétés de gestion indépendantes en Suisse.

Cette belle réussite, en des temps pourtant incertains, DECALIA la doit en grande partie à sa volonté de développer et d’intégrer dans la gestion de ses portefeuilles des stratégies innovantes, adaptées à un monde engagé dans de profondes transformations. Il en va ainsi de son offre private markets et de ses fonds long only centrés sur des thématiques porteuses comme l’économie circulaire.

Alfredo Piacentini et Rodolfo De Benedetti, ses fondateurs, reviennent ici sur leur parcours ainsi que sur leurs aspirations.

Quel bilan faites-vous de ces sept années écoulées depuis la création de DECALIA ?

Alfredo Piacentini : Notre croissance se poursuit à un rythme assez soutenu. Nos actifs sous gestion approchent des 5 milliards de francs. En sept ans, je pense que c’est une belle réussite.

Rodolfo De Benedetti : D’autant que sur ces cinq milliards, les actifs apportés par les associés ne représentent qu’une petite part.

Et qu’en est-il de votre progression dans chacun de vos métiers, à savoir gestion privée, private markets et asset management ?

Alfredo Piacentini : En ce qui concerne l’activité de gestion privée, nous avons bien avancé dans la mesure où nous avons su attirer des gérants de qualité. Nous avons également obtenu de bons résultats avec les marchés privés, où nous avons réussi à proposer des produits originaux. En revanche, la ligne asset management est légèrement inférieure à nos attentes. Il nous a peut-être manqué un blockbuster sur les long only, pour monter plus vite en puissance.

Rodolfo De Benedetti : Dans le monde d’aujourd’hui, il faut beaucoup plus de temps pour établir une gamme long only, parce que les règles des sélectionneurs sont devenues plus strictes. Avoir les bonnes idées et les bons gérants ne suffit pas. Mais nous pouvons nous montrer patients car il me semble que nous avons bien choisi les thèmes sur lesquels nous nous sommes positionnés, à savoir les Millennials, le vieillissement de la popula- tion et l’économie circulaire. Nous avons été précurseurs dans plusieurs domaines et nous aurions peut-être mérité une collecte plus importante.

En dehors des presque cinq milliards d’encours, quels sont les chiffres clés pour se représenter DECALIA aujourd’hui ?

Alfredo Piacentini : Nous employons 65 collaborateurs répartis sur deux centres, et bientôt trois. Après Genève et Milan, nous avons l’intention de renforcer notre présence sur Zurich. Nous avons lancé une dizaine de stratégies long only et, pour la partie private markets, nous avons initié 17 opérations. Et nous avons toujours été profitable.

Rodolfo De Benedetti : Nous avons aussi énormément investi, que ce soit dans les équipes, dans la gamme ou dans le savoir-faire. Ensuite, nous avons toujours eu la volonté d’innover en introduisant chaque année de nouveaux produits, de nouvelles stratégies. Nous essayons systématiquement de prendre un peu d’avance sur notre marché, comme ce fut le cas par exemple avec nos thèmes ESG. Avec tout cela, nous avons su créer une bonne culture d’entreprise au sein de DECALIA.

Où vous voyez-vous dans cinq ans ?

Alfredo Piacentini : Doubler les actifs nous paraît envisageable, même si un peu ambitieux, avec une croissance équilibrée entre nos trois lignes de métier. Sur la partie long only, nous aimerions développer un ou deux blockbusters au cours des cinq prochaines années. Pour ce qui est des private markets, nous avons un pipeline assez dense. Quant à la gestion privée, c’est une activité qui a le mérite de se nourrir de ses propres succès. Plus vous grandissez, mieux vous assurez votre croissance.

Rodolfo De Benedetti : Pour revenir sur les private markets, les premières stratégies que nous avons mises en place arrivent à échéance avec des résultats concluants et des investisseurs satisfaits. Nous obtenons des TRI annuels supérieurs à 10%. Nous sommes donc dans une bonne dynamique, mais l’idée est de rester sélectifs. Dans la mesure où nous investissons nos propres fonds dans chacune de ces opportunités, nous partageons l’upside comme le downside avec nos investisseurs. L’équipe dédiée aux private markets a grandi, elle compte une dizaine de personnes et nous disposons aujourd’hui de compétences en termes de sourcing, d’analyse, de due diligence, de structuration que nous n’avions pas au lancement de DECALIA. Nous pouvons désormais déployer entre quatre et cinq opérations dans l’année, sans se disperser.

Quels sont vos plans pour la ligne asset management ?

Alfredo Piacentini: Avoir les bonnes idées, et plus encore les bonnes personnes pour les mettre en forme ! Notre challenge, c’est d’aller chercher d’excellents gestionnaires en dehors de la Suisse et de les attirer ici à Genève, en leur présentant un beau projet. Ce n’est pas facile, mais ce n’est pas non plus impossible. La preuve en est que nous venons de renforcer de manière significative l’équipe long only en recrutant deux très bons gérants. Le projet que nous leur avons présenté leur a suffisamment plu pour qu’ils décident de s’installer à Genève.

Pour revenir sur vos ambitions, est-il possible de gérer dix milliards sans licence bancaire ?

Alfredo Piacentini : Oui, puisque d’autres y parviennent. C’est une réflexion en cours. A partir de dix milliards, la licence devient intéressante si le pôle gestion privée constitue un bon socle avec des encours qui se situent au-delà des deux milliards. Quand on commence à dépasser ce seuil, on peut décemment se poser la question. 

Rodolfo De Benedetti : Lorsqu’on pense à la licence bancaire, il y a forcément un coût d’opportunité à évaluer. Le plus difficile à quantifier, c’est ce qu’il en coûte à la direction d’une structure comme la nôtre, pas gigantesque, de se consacrer davantage aux tâches administratives liées à la licence plutôt qu’au développement de la société ou aux portefeuilles de nos clients. La voilà la question primordiale : comment concilier la licence bancaire avec les intérêts de nos clients.

N’est-il pas plus facile de promouvoir une gamme de fonds avec une licence bancaire ?

Alfredo Piacentini : En Suisse, et même en Europe, il est vrai que le statut de banque a un côté très sécurisant. Indéniablement, il confère un certain avantage. Ce qui peut parfois paraître étrange car, aux Etats-Unis ou en Angleterre, personne ne se demande si Blackrock ou Fidelity sont des institutions bancaires ou non.

Licence ou non, de quelle manière souhaitez-vous que vos clients et prospects perçoivent DECALIA ?

Alfredo Piacentini : Nous voulons que nos clients et nos prospects comprennent bien que nous sommes là pour leur proposer des solutions d’investissement innovantes qu’ils ne trouveront pas forcément ailleurs. Que ce soit dans la gestion privée, les fonds de placement ou les private markets, nous sommes toujours à l’affût de nouveautés, d’originalité, et aussi d’exclusivité.

Rodolfo De Benedetti : Nous ne recherchons pas l’originalité pour le goût de l’originalité. Nous voulons juste bien saisir les tendances en cours, et se positionner en prenant de l’avance car acquérir une expertise dans un nouveau domaine réclame forcément un certain laps de temps.

Où se trouve alors l’innovation pour DECALIA ?

Alfredo Piacentini : Dans le domaine de la gestion privée, l’innovation porte d’abord sur les stratégies d’allocation. C’est le cas par exemple des placements de type private markets qui ont aujourd’hui ce côté innovant qu’avaient les hedge funds dans les années 2000.

Rodolfo De Benedetti : Dans le long only, on trouve quasiment tout. Récemment, je suis même tombé sur un ETF calqué sur les placements de produits dans les films de James Bond. Là, c’est pousser très loin la thématique.

Alfredo Piacentini : Nous n’avons pas le choix. Il faut absolument que nous innovions, pas seulement pour nos clients mais aussi pour les gérants que nous voulons attirer chez DECALIA. En venant chez nous, ils doivent trouver des arguments commerciaux qui soient aussi pour eux des avantages concurrentiels.

En quoi votre façon de gérer est-elle différente de ce qu’elle était voilà 15 ans ?

Alfredo Piacentini : 2008 a été une sacrée secouée. Pour beaucoup de monde. Tous les modèles de risque ont sauté. Durant les trois, quatre ans qui ont suivi la crise financière, on comprend que les gens aient tiré le frein à main. La part obligataire a augmenté dans les portefeuilles et les fonds alternatifs en sont sortis massivement, avec les produits illiquides ou un peu trop complexes.

Les très fortes baisses de taux ont changé la donne. Les investisseurs, toujours en quête de rendement, ont repris du risque en reve- nant sur les actions. Le fixed income a fondu, les stratégies de liquidité ont disparu et puis ce sont des stratégies alternatives comme les private markets, illiquides par nature, qui ont intégré les grilles d’allocation. Il faut toutefois rester vigilant. Les private markets ne doivent pas tomber dans les mêmes travers que les hedge funds en 2007. Ils doivent être limités à des portefeuilles d’une certaine taille, pour des investisseurs plutôt sophistiqués. Il faut pouvoir assumer l’illiquidité qui les caractérise.

Rodolfo De Benedetti : Aujourd’hui, il est de plus en plus difficile de remplir la poche obligataire. D’une part, il n’y a pas de rendement courant sur le portefeuille et, d’autre part, indépendamment du rendement, vous n’avez pas très envie d’avoir votre capital à risque sur des instruments à revenus fixes avec des taux à leur minimum historique. Le risque de perte en capital n’est pas négligeable en cas de retournement sur la structure des taux. Voilà ce qui a beaucoup changé.

A propos de ces marchés, comment procéder à la sélection de produits toujours plus complexes, toujours plus nombreux ?

Alfredo Piacentini : Les marchés financiers réclament des compétences toujours plus fortes. Quand j’ai débuté dans ce métier, les options nous paraissaient alors des instruments très sophistiqués. Aujourd’hui, elles sont passées dans le langage courant pour ainsi dire. Dans la gestion de portefeuille, elles sont devenues une sorte de minimum syndical. Et de nouveaux instruments voient constamment le jour. La base du métier reste peut-être la même mais il est nécessaire aujourd’hui de s’entourer de spécialistes pour maîtriser ces différents outils.

Rodolfo De Benedetti : Tout est affaire de compétences, puisque la gestion de portefeuille est devenue très technique. Ce qu’elle réclame aujourd’hui relève davantage du travail d’équipe que du gérant qui fonctionne en solo. La première mission d’un gérant aujourd’hui, c’est de rassembler autour de lui les différents experts dont il aura besoin pour adapter sa gestion à un monde qui change de plus en plus rapidement. Et c’est bien dans cette logique que nous nous développons.